En plein Salon de l’Agriculture, le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire (MASA) a lancé un « plan gouvernemental renforcé de reconquête de notre souveraineté sur l’élevage ».
Interprétant à sa façon les besoins de la transition agroécologique, ce plan, que l’on croirait écrit par les plus gros lobbies de la filière viande, prévoit notamment de :
– Redorer l’image de la viande auprès des consommateurs, alors que les Français mangent déjà 2 fois plus de viande que la moyenne mondiale (contre toute logique environnementale)
– Booster la filière bovine ainsi que les élevages intensifs au lieu de promouvoir les protéines végétales et l’agriculture biologique
– Revoir le contenu des manuels scolaires pour en éliminer « des raccourcis conduisant à des stigmatisations » (comprendre : diabolisant la filière)
– « En parallèle, le Gouvernement s’attachera à combattre les attaques injustifiées menées à l’encontre de l’élevage, souvent mues par une idéologie visant à la fin de la relation homme-animal connue jusqu’alors. Cela passera, par exemple, par la demande d’interdiction au niveau européen de la viande de synthèse. » Une alternative pourtant intéressante à étudier pour limiter considérablement le nombre d’animaux élevés et abattus.
Une des mesures prévoit également une « Obligation pour les restaurants collectifs d’intégrer dans leurs menus 100% de produits durables et de qualité dans les familles « viandes » et « poissons » ». Qu’entendent-ils par « durable et de qualité » ? Si l’on se fie à leur détournement habituel des définitions (cf le « flexitarisme » à la sauce Interbev), nous pouvons craindre le pire…
Pour Frédéric Freund, directeur de l’OABA :
« Nous devons produire ce que nous consommons » : chiche Monsieur le ministre !
Alors arrêtons d’exporter nos bovins vivants vers des pays lointains tout en important de la viande provenant également de pays lointains.
Recréons une vraie filière ovine en France, complétement détruite ces dernières années par le libre échangisme poussé à outrance.
Recréons des abattoirs publics avec un contrôle public digne de ce nom et arrêtons de donner carte blanche à quelques opérateurs privés qui deviennent si puissants qu’ils font la pluie et le beau temps, en établissant des prix qui mettent nos éleveurs au tapis.
Cessons d’encourager la productivité, la quantité au détriment de la qualité. Redonnons de la fierté à nos paysans qui doivent rester des éleveurs, pas des industriels. Orientons les aides PAC vers ces productions de meilleure qualité qui mettent à l’honneur nos terroirs et protègent nos territoires tout en évitant les pires pratiques envers les animaux.
Cessons de caricaturer les débats en opposant systématiquement les agriculteurs aux défenseurs de la nature (environnement et animaux). Certains sujets méritent des concertations plus que des oppositions stériles.
Un énième plan ne sauvera pas notre agriculture. Il faut remettre à plat notre système agricole. Produire pour nourrir les Français, pas pour faire du business. Et protéger nos productions nationales et européennes. C’est à ce prix que nous sauverons nos paysans, nos produits, notre environnement et notre santé.
« Gouverner, c’est prévoir ». Alors, au boulot !
Un décret rétrograde
Le MASA n’a rien compris à la crise agricole. Continuons donc à produire (et non à élever), toujours plus gros, plus polluant, plus maltraitant : en somme, osons l’écrire, plus merdique !
Dans cette lignée, il a également préparé un projet de décret facilitant l’extension des élevages industriels de volailles et de porcs. En résumé : vive les méga-élevages, et non aux contentieux qui leur mettent des bâtons dans les roues !
Ce décret, qualifié de « rétrograde » par Agir pour l’Environnement, est destiné à relever les seuils d’évaluation environnementale préalable à l’agrandissement de ces élevages intensifs. Objectif : « simplifier et accélérer les procédures administratives pour les bâtiments d’élevage ».
Si le décret est validé en l’état, les seuils d’évaluation systématique passeront :
– de 40 000 à 85 000 poulets de chair (plus du double !),
– de 2 000 à 3 000 porcs en engraissement,
– de 750 à 900 truies.
Vous pouvez apporter votre avis sur ce projet via la consultation publique (jusqu’au 17 mars) :
La FNSEA (1er conseiller du ministre) veut des exploitations toujours plus grandes et en a « assez » des normes… Mais que se passera-t-il quand toutes les rivières seront polluées ? Que fera-t-elle si une maladie hautement contagieuse émerge dans ces élevages gigantesques ? Et combien y aura-t-il encore d’incendies destructeurs, laissant périr des milliers d’animaux dans les flammes ? Combien de milliards d’animaux supplémentaires connaîtront une vie de misère, entassés avec leurs congénères et sans aucune possibilité d’avoir accès à l’extérieur voire à la lumière du jour ?
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