L’une des missions principales de l’OABA est l’audit d’abattoirs. Cela consiste à évaluer et conseiller des abattoirs désireux de s’améliorer sur le plan de la bientraitance animale.

Les abattoirs existent et continueront d’exister pendant de nombreuses années. L’OABA pallie le manque d’effectif des agents de l’État en faisant son possible pour améliorer les conditions d’abattage.

Cette année, l’OABA a été sollicitée par Terrena* pour une mission de grande envergure : la construction d’un abattoir de volailles « nouvelle génération » à Ancenis. Le but de Terrena : reconquérir des parts de marché des poulets importés de façon à garantir aux consommateurs français une prise en compte optimale de la bientraitance animale. « Manger moins, mais mieux » est clairement la tendance actuelle concernant la viande. Mais plus de 50% de la viande de poulet consommée en France provient encore de l’étranger.

Le président de l’OABA Jean-Pierre Kieffer et le délégué coordinateur de l’OABA Michel Courat, tous deux docteurs vétérinaires, ont visité l’actuel abattoir d’Ancenis (Loire-Atlantique) cette année. Ils y ont rencontré Ivan Jégo (Directeur Qualité Pôle Volaille de Terrena) et Christophe Couroussé (directeur du développement agricole de Terrena).

Galliance, le pôle volaille du groupe Terrena, s’était déjà engagé sur la voie de la bientraitance animale en 2017 en évaluant ses abattoirs sur la base d’une grille élaborée avec la collaboration de l’OABA qui, par ailleurs, participe régulièrement à des réunions interprofessionnelles en sa qualité d’association spécialisée dans la protection des animaux à l’abattoir.

C’est donc tout naturellement que Galliance s’est à nouveau tournée vers l’OABA pour ce projet d’envergure.

L’OABA s’est attachée à expliquer que la bientraitance des animaux commençait dès l’élevage des parents des poussins, en passant par le couvoir et l’élevage proprement dit des poulets. Il fallait donc intégrer dans ce projet la partie « collecte » des animaux, le transport, et l’abattage.

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Grâce à ses arguments, l’OABA a joué un rôle essentiel qui a permis d’aboutir à un certain nombre de modifications du projet d’Ancenis, comme le passage à 100% d’étourdissement gazeux, malgré l’investissement budgétaire important que cela suppose pour l’abattoir (de l’ordre de plusieurs millions d’euros).

En effet, le système d’étourdissement électrique à bain d’eau, bien qu’infiniment plus éthique que l’abattage sans étourdissement, est scientifiquement reconnu comme préjudiciable pour la bientraitance des poulets.

Lors d’un étourdissement par électronarcose à bain d’eau, les poulets sont anesthésiés par un courant électrique qui les rend insensibles au moment de la saignée. Auparavant, ils ont été manipulés à plusieurs reprises depuis leur ramassage dans l’élevage jusqu’à leur accrochage par les tarses (chevilles) sur des crochets métalliques où ils sont suspendus la tête en bas pendant plusieurs dizaines de secondes. Cette suspension en position non physiologique est une cause de douleur et de stress.

Ce système d’étourdissement est également une source d’aléas qui peuvent occasionner des ratés et notamment une saignée de poulets encore conscients.

Par ailleurs, la cadence d’abattage est impressionnante et stressante, à la fois pour les animaux et les employés d’abattoirs, et peut atteindre 12 à 14 000 poulets abattus chaque heure dans certains abattoirs.

Bien que cette méthode soit reconnue comme mauvaise pour la bientraitance des poulets par la Commission européenne, elle reste néanmoins très utilisée en France pour des raisons uniquement économiques.

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Ainsi, pour ce nouvel abattoir, l’OABA a fortement recommandé le passage à l’étourdissement gazeux, qui s’avère beaucoup plus respectueux de la bientraitance des poulets.

Dans ce projet, cette méthode change toute la procédure de prise en charge des animaux, et ce depuis l’élevage : au lieu d’être entassés à 5 ou 10 dans des micro-caisses, les poulets sont rassemblés par groupes de 80 dans des grands modules, par un système entièrement mécanisé, le moins stressant possible. Ils sont moins stressés car ils restent tous ensemble, se voient les uns les autres, et disposent de beaucoup plus de place que dans une cage classique : ils peuvent se coucher et éviter les fientes des congénères… Ce qui leur garantit un meilleur confort lors du transport.

Autre point positif : dans ce projet, le déchargement des animaux se fait dans le quart d’heure qui suit leur arrivée, afin de limiter leur exposition à des conditions climatiques parfois difficiles (le froid ou, pire, la canicule).

Ils sont alors transférés tels quels, sans être sortis de leur module, dans des tunnels qui vont les exposer à des concentrations en gaz progressives (O2 et CO2), jusqu’à entraîner une inconscience irréversible. Les animaux vivants ne sont donc jamais manipulés individuellement. Ils restent en groupe et dans une position physiologique tout au long du processus.

Notre délégué coordinateur Dr Michel Courat a pu observer par lui-même que les poulets restaient calmes et ne présentaient aucun signe de souffrance respiratoire particulier lors de cet étourdissement gazeux progressif. En effet, le dioxyde de carbone n’a pas d’effet aversif (irritant pour les muqueuses respiratoires) aussi marqué chez les volailles que chez les porcs.

Suite à cette méthode d’étourdissement, on n’observe aucun retour de conscience des animaux lors de l’accrochage et de la saignée, étapes qui se font dans le calme et l’absence de stress pour les opérateurs puisque les animaux sont totalement inconscients et donc totalement inertes.

Cette technique d’étourdissement gazeux s’est fortement développée ces cinq dernières années pour les volailles et est appelée à se développer de plus en plus dans les années à venir, pour tenir compte des citoyens attachés au respect de la bientraitance des animaux.

De par son expertise, l’OABA a donc pu améliorer ce nouveau système industriel qui s’avérait prometteur mais auquel il manquait certaines garanties de bientraitance des animaux.

Notamment, pour cet abattoir, l’OABA a demandé à ce que :

  • le temps total de transport et d’attente des animaux n’excède pas 3 à 4 heures entre leur ramassage dans l’élevage et leur abattage
  • la cadence d’abattage soit plus faible (6 à 8000 poulets par heure)
  • l’attente des animaux avant le déchargement soit de 15 minutes maximum, grâce à une planification appropriée de l’arrivée des camions
  • les animaux attendent un minimum dans une zone d’hébergement climatisée et protégée du stress
  • la présence des poulets dans le tunnel d’étourdissement ne dépasse pas 5 minutes
  • les concentrations en gaz soient surveillées en permanence et enregistrées
  • l’hygrométrie soit régulée depuis le déchargement jusqu’à la fin de l’étourdissement
  • des contrôles soient faits le plus souvent possible : à la réception des animaux afin de détecter des potentiels animaux en souffrance ; et lors de l’étourdissement à l’aide de hublots maintenus propres afin de surveiller les animaux
  • l’abattoir bénéficie d’un système d’étourdissement de secours en cas de panne, pour éviter l’attente des animaux
  • l’abattoir installe un système de contrôle vidéo, couvrant l’ensemble des opérations sur les animaux vivants. Sur ce dernier point cependant, l’OABA n’a pas encore eu de retour de l’abattoir d’Ancenis. Néanmoins, pour être classé A ou B sur l’ « étiquette bien-être animal », la vidéosurveillance est un critère obligatoire.

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L’étourdissement gazeux des volailles est encore rare en France car cela demande un lourd investissement. Plusieurs abattoirs dont ceux des poulets label rouge de Loué ont d’ores-et-déjà investi dans un système d’abattage similaire à celui-ci.

Il est à souligner que les directeurs d’abattoirs ont tout à y gagner, tant d’un point de vue protection animale que de protection salariale : en effet, les ouvriers travaillent dans une ambiance plus calme et moins stressante avec cette méthode d’étourdissement.

En France, l’OABA et « l’étiquette bien-être animal » contribuent à une forte dynamique d’évolution des conditions d’abattage des poulets.

Les ONG européennes de protection animale, dont l’OABA, ont demandé aux gouvernements, dans le manifeste du Better Chicken Commitment, à viser 100% d’étourdissement gazeux des volailles dans toute l’Europe d’ici 2026.

Avec le développement de cette technique d’étourdissement, il est fort probable que les coûts d’investissement s’amenuiseront avec le temps, permettant à de plus en plus d’abattoirs d’acquérir cette technique, et donc d’améliorer les conditions d’abattage des volailles en France.

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*groupe coopératif agroalimentaire français, un des acteurs majeurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire en France.

 

Article de presse : « Une nouvelle génération d’abattoirs pour la volaille française »